Des programmes comme ChatGPT peuvent-ils être considérés comme des dispositifs médicaux au sens de la législation européenne?
par Daniel Wurm
Avec la publication de la version 3.0 du logiciel par OpenAI, ChatGPT et l’intelligence artificielle en général ont connu un grand engouement, qui se poursuit jusqu’à présent.
ChatGPT est capable de produire des textes individuels, de mener des conversations et de répondre en détail à n’importe quelle question. Pour ce faire, ChatGPT se sert de données disponibles sur Internet et les transforme en réponse souhaitée à l’aide de l’algorithme d’intelligence artificielle.
Aujourd’hui, ChatGPT est utilisé des millions de fois par jour par un grand nombre d’utilisateurs et fait partie des plates-formes les plus utilisées sur Internet.
Le succès du programme OpenAI ne se déroule toutefois pas sans heurts du point de vue juridique. Outre les problèmes liés au droit d’auteur et à la protection des données, la discussion touche également le secteur du droit (européen) des dispositifs médicaux et les premières voix demandent que ChatGPT soit considéré comme un dispositif médical et qu’une procédure d’évaluation de la conformité soit mise en œuvre.
Pour cela, ChatGPT devrait constituer un dispositif médical au sens de l’article 2, point 1, du règlement (UE) 2017/745 (« MDR »). Selon le texte de la loi, on entend par dispositif médical « …un logiciel […] destiné, selon le fabricant, à être utilisé par des êtres humains et […] destiné à remplir l’objectif médical spécifique suivant […] ».
La finalité médicale comprend par exemple le diagnostic, la prévention ou le traitement de maladies.
En principe, il semble possible d’utiliser ChatGPT sous cette définition. Si l’on saisit des symptômes dans ChatGPT et que l’on demande quelle maladie on pourrait avoir, le programme donne une liste de maladies possibles.
Il pourrait donc s’agir d’un dispositif médical sous la forme d’un logiciel servant au diagnostic de maladies.
La classification en tant que dispositif médical sur cette seule base est toutefois insuffisante et ne correspond pas au régime légal.
Ce qui est déterminant pour la classification en tant que dispositif médical, ce ne sont pas les fonctions possibles, mais la finalité subjective du fabricant (voir ci-dessus : « …qui, selon le fabricant… »).
La notion de destination elle-même est définie à l’article 2, point 12, du règlement (UE) 2017/745, selon lequel il s’agit de « l’utilisation à laquelle un dispositif est destiné, conformément aux informations fournies par le fabricant sur l’étiquetage, la notice d’utilisation ou le matériel de promotion ou de vente, ou aux informations fournies par le fabricant dans la publicité ou la vente, et à ses déclarations lors de l’évaluation clinique ».
Déjà dans l’exemple ci-dessus, ChatGPT indique à la fin de son énumération qu’il ne doit pas s’agir d’un diagnostic médical et suggère à l’auteur de la question de consulter un médecin qui peut établir un diagnostic.
En examinant le site web et les documents publicitaires de ChatGPT, rien n’indique qu’il y ait une utilisation à des fins médicales. De plus, ChatGPT répond par la négative à la question de savoir s’il s’agit d’un dispositif médical. Sa fonction principale serait la rédaction de textes.
Par conséquent, ChatGPT n’est pas un dispositif médical. Cela correspond également au point de vue de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) qui, dans une décision de 2012 (arrêt du 22.11.2012 – C-219/11 – Brain Products GmbH/BioSemi VOF e.a.), a clairement établi que « […] dans les cas où un produit n’a pas été conçu par son fabricant pour être utilisé à des fins médicales, aucune certification du produit en tant que dispositif médical ne peut être exigée […] ».
Il convient toutefois de noter que, dans une jurisprudence récente, la CJCE s’est déjà appuyée, dans ses motifs, sur le consommateur moyennement informé comme indice de délimitation entre les médicaments et les dispositifs médicaux (arrêt du 19.01.2023 – C-495/21, C-496/21).
Selon les médias, le BfArM a répondu à une demande du cabinet « Vorberg.law » adressée à l’Institut fédéral des médicaments et des dispositifs médicaux (BfArM) en indiquant que le respect des dispositions légales de la législation sur les dispositifs médicaux incombait aux fabricants et que la surveillance du respect de cette législation relevait des autorités régionales.
En résumé, dans la situation juridique actuelle, ChatGPT ne constitue pas un dispositif médical au sens du règlement (UE) 2017/745. Il reste cependant à voir dans quelle mesure les autorités et le législateur estimeront nécessaire de prendre d’autres mesures à l’avenir.
Si vous avez d’autres questions concernant l’utilisation de l’IA dans les dispositifs médicaux, n’hésitez pas à nous contacter.